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Tranches de Vie
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29 septembre 2015

Le dîner

Deux semaines plus tôt j'ai invité Max à venir dîner à la maison. C'était plutôt inattendu comme proposition. Nous discutions comme à l'accoutumée, de tout et de rien. Il m'a paru triste. Visiblement sa solitude lui pesait. Alors j'ai sauté sur l'occasion. « Pourquoi tu ne viendrais pas manger à la maison ce soir ? » Il a levé ses yeux marron vers moi et a souri. Un sourire timide et tendre. Malgré son âge, il paraissait être un petit garçon, attristé par la vie. « C'est très gentil de ta part », m'a-t-il dit. « Je viendrai ». « Je ne sais pas ce que tu aimes manger. Mais avec un peu d'imagination je pourrai bien nous concocter un petit quelque chose. » « Ne t'en fais pas. Quoi que tu fasses m'irait parfaitement. Qu'est ce que j'apporte ?». « Du pain ? ». « Va pour le pain ». On s'est quitté en milieu de journée. Une belle journée ensoleillée aux traits d'automne naissant. Je me sentait comme sur un nuage. Jamais je n'aurais pensé qu'il accepterait mon invitation aussi facilement. Mais il l'a fait. En rentrant chez moi, le stress s'est emparé de moi. Je me suis mise à ranger frénétiquement la maison. Je tenais à faire bonne impression même si je savais que sa réponse à mon invitation était d'ordre amical. Je ne pensais pas qu'un homme de son genre pourrait s'intéresser à moi. Maxime est un bel homme, grand, fort, avec beaucoup de charme... mais aussi beaucoup de femmes à son actif. A chacune de nos rencontres, il se dressait face à moi, tel un mur solide et protecteur. Son regard m'hypnotisait, sa voix faisait fondre mon cœur. Je ne me pensais plus capable ressentir de telles émotions. Mon ancienne relation s'est soldée par un échec retentissant, emportant toute confiance en moi sur son passage. Je me sentais trahie, abusée, anéantie... Vers dix neuf heures, j'ai commencé à tourner dans mon appartement comme une lionne en cage. J'avais chaud, j'étais inquiète. Et s'il ne venait pas ? Mais il est venu. A dix neuf heures trente, comme prévu, il sonnait à ma porte. Il était là, souriant, une baguette de pain à la main. « Bonsoir M'dame ! » « Bonsoir M'sieur. Entre. » Mon corps envahi par une nouvelle bouffée de chaleur. Ma chienne s'est précipitée vers lui, la queue battante, le jouet dans la gueule. Elle aussi semblait ravie de le voir. « Ta journée s'est bien passée ? » « Ouf », a-t-il soupiré. « Elle m'a paru interminable ». J'ai supposé qu'il était content d'être là. Je lui ai fait un petit tour de mon chez moi, un peu rapide vu la taille. « Tu veux une bière ? » « Volontiers. » On s'est posé dans mon salon, les bières fraîches posées sur la table basse. Mes mains agitées trahissaient ma nervosité. Mais il fait semblant ne pas la voir. Il s'est mis à me raconter sa journée. J'essayais de me concentrer sur ses dires mais son regard chaud et intense m'empêchait d'avoir l'esprit clair. Il m'a demandée comme s'était passé la mienne. J'ai baragouiné un semblant de réponse sans importance, tout en fixant le col légèrement déboutonné de sa chemise. Parfois je me demande s'il se rend compte que je prends un malin plaisir à le déshabiller du regard. Je m'imagine défaire ses boutons, un à un, en glissant ma main sur son torse. Cette vision me donne soif. Je reprends une gorgée de bière. « Tu as faim ? » « Oui, j'avoue. » - m'a-t-il répondu. « Ça t'ennuie si on mange dans la cuisine ? » Son visage s'est fendu en un sourire malicieux. « Bien sûr que non !  Qu'est ce qu'on mange ?» Mon frigo n'étant pas très garni, j'ai réussi tout de même à nous improviser un poulet grillé avec des gnocchi à la tomate. Je suis partie dans la cuisine pour débarrasser nos bouteilles vides et surveiller le poulet. J'ai entendu ses pas dans le couloir. « Ça sent très bon ». Il s'est penché par dessus de mon épaule, son corps effleurant à peine mon dos. Sa présence, sa chaleur, son odeur m'enveloppaient tels un cocon douillet. Je n'osais plus bouger. Je savourais l'instant, tout en remuant mon poulet de façon très approximative. Certes, à ses yeux, je n'étais qu'une collègue, sinon une amie. Alors que de mon côté, je me liquéfiais dès que j'apercevais sa tignasse poivre et sel, dès que je captais son sourire, dès que son regard, profond et sérieux, se posait sur moi. « C'est prêt ! » Je me suis retournée un peu trop vite, comme quelqu'un pris sur le fait, les joues un peu trop rouges, les pupilles un peu trop dilatées. J'avais du mal à cacher à quel point j'étais attirée par lui. Nous nous sommes posés à table. Il me parlait de ses dernières vacances en famille, m'assurait que mon plat était très bon, refusait poliment le sel, s'essuyait délicatement la bouche avec la serviette. J'assistais à ce spectacle en silence, presque émue, telle une gamine de quinze ans, les yeux pleins d'étoiles.
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